Apprendre pierre par pierre #
Tout a commencé lors d’un matin gris de janvier. Le comité de direction venait de finir une réunion stratégique difficile. Les chiffres du dernier trimestre étaient en baisse. La concurrence prenait de l’avance, et l’innovation stagnait. Il devenait urgent de relancer la dynamique. Il fallait trouver une idée nouvelle. Tout le se tourne vers Henry. C’est l’ancien. Il a tout vu et tout vécu. Souvent, en reliant deux souvenirs, il crée une nouvelle connexion. Mais ce jour-là, Henry n’est pas là, sa chaise est vide. Henry est parti à la retraite il y a deux jours.
Alors, on plonge dans notre base documentaire. Tout y est très bien organisé, des dossiers par missions, par division, par date… si bien que réussir à connecter deux informations liées est pratiquement impossible.
On ne peut jamais prévoir l’utilité d’une information #
La prise de notes est souvent considérée à l’envers. On veut tout de suite tout organiser convenablement, tout bien ranger. Or quand on reçoit une information, il est en général impossible de prévoir son utilisation future. Au début de Cornis, nous essayions de trouver des clients pour un produit d’analyse de vibrations. Lors d’une discussion avec un client intéressé, il a partagé sa difficulté à examiner en détail l’état de ses pales. Cette anecdote hors sujet va nous aider à changer de cap. Elle nous inspirera à créer un produit qui rendra l’entreprise rentable.
Un autre point important sur la connaissance est qu’une information intéressante peut apparaître à tout moment, sans prévenir. Et si l’on n’est pas prêt à avoir un endroit où noter cette information, elle sera perdue.
Heureusement, ce constat n’est pas nouveau. Une méthode s’est développée pour créer une base de connaissances durable et utile : la méthode Zettelkasten.
Se préparer à recevoir, s’organiser pour retrouver #
Cette méthode consiste déjà à séparer deux principes :
Etre capable de stocker une nouvelle information facilement, sans réfléchir
Etre capable de retrouver l’information quand on en a besoin
En général, selon les personnes, on traite bien qu’un seul des deux points, mais pas les deux. Les personnes qui portent un carnet peuvent prendre des notes facilement. Mais, elles ont du mal à s’y retrouver. Les personnes qui classent bien leurs documents peuvent retrouver facilement l’information. Ajouter de nouveaux fichiers peut être compliqué. Cela est particulièrement vrai lorsqu’ils touchent à plusieurs sujets.
La méthode Zettelkasten va proposer les 3 étapes suivantes.
1. Prendre des notes volantes… #
D’abord, avoir un dossier où on va noter en vrac plein de notes. Vous pouvez appeler ce dossier “inbox”. Comme une boîte de réception d’e-mail, l’objet de ce dossier va être d’être vidé, mais on en reparlera. Le principe est de créer un endroit pour stocker les informations sans réfléchir, dès qu’elles arrivent.
Cela peut être une pensée sur un livre ou un article que vous lisez. Cela peut aussi être une simple citation.
Il y a quelques années, j’ai lu “Weinberg on Writing: The Fieldstone Method.” En lisant une citation, je prends une note volante.
“Every day is different; every idea is different; every mood is different; so why should every project be the same?” - Gerald Weinberg in The fieldstone method
La standardisation peut sembler ordonnée, mais souvent, elle nuit à l’organisation des projets.
Une note courte avec la citation et surtout une phrase qui explique pourquoi j’ai retenu cette citation.
2. Réagir et connecter, faire des notes permanentes #
Régulièrement, comme une fois par semaine, vous allez revoir et traiter vos notes volantes. Traiter ces notes signifie créer des notes “permanentes”. Ces notes serviront de base à votre connaissance.
Ces notes permanentes sont plus structurées que les notes volantes. En particulier, elles respectent certaines règles strictes :
- Une seule note par idée.
- Des notes brèves, n’hésitez pas à subdiviser en plusieurs notes.
- Des liens, des connexions à d’autres notes, à des sujets, des tags, etc.
Par exemple, à partir de la note précédente, je vais créer ou compléter une note autour d’une idée.
Titre : La standardisation n’est pas un but en soi tags: organisation, productivité
…
Le réflexe est souvent de tout standardiser. On pense que cela aide à retrouver plus facilement ce qu’on cherche. Mais avec les outils numériques, ce n’est pas toujours vrai. Weinberg, dans The Fieldstone Method, présente une approche diffêrente. Elle met l’accent sur la recherche et le partage d’informations, pas seulement sur leur organisation.
…
Cette note est plus complète. Elle se concentre sur une idée. Elle est aussi connectée par des tags et des liens vers d’autres notes et elle peut regroupere plusieurs notes volantes si elles partagent la même idée. Un des exercices à ce stade est justement de chercher à quoi lier l’information. C’est important car cela aidera à retrouver l’information plus tard.
3. indexer #
La dernière étape peut se faire en même temps que la précédente ou à des intervalles moins réguliers. Elle consiste à créer des notes plus générales, avec des liens vers les notes permanentes. Ces notes servent d’entrée à nos fils d’idées.
Au fur et à mesure, on construit un graphe de connaissance que l’on peut naviguer.

Bonus : Partager sans effort #
Le grand avantage de cette méthode est qu’elle permet de rapidement synthétiser un sujet. Certaines idées fortes vont remonter dans les notes. On pourra facilement les utiliser pour créer un article à partager.
Mieux encore, on peut adapter la méthodologie pour avoir un partage régulier. Par exemple, si vous voulez faire un post hebdomadaire pour vos équipes, voici comment procéder. Il suffit de créer une note volante “Veille”. Ajoutez chaque article d’actualité intéressant à cette note. N’oubliez pas d’inclure un commentaire.
A la fin de la semaine, votre veille est prête à être revue.
Logiciel #
Lier des notes peut être compliqué. Heureusement, des logiciels existent pour aider. Mon logiciel préféré pour ça est Obsidian. Il est gratuit et open source. Toutes les notes sont stockées comme des fichiers texte. Cela signifie qu’elles sont locales et faciles à exporter vers d’autres logiciels.

Références #
Pour aller plus loin, quelques références :
Weinberg on Writing qui présente la méthode très simplement
Tutoriel Obsidian sur une manière de configurer Obsidian pour appliquer la méthode Zettelkasten